Les inquiétants projets de monsieur Sarkozy

Publié le par Takana

À droite, toute . Lors de ses voeux, le ministre de l’Intérieur a annoncé un durcissement de sa politique sécuritaire. Le président de l’UMP a plaidé pour une présidentialisation accrue du régime.

Pas évident, lorsque l’on porte une double casquette, de présenter des voeux cohérents. Pour résoudre le problème, Nicolas Sarkozy avait choisi de diviser son intervention en deux parties bien distinctes : d’abord les voeux du ministre de l’Intérieur, ensuite ceux du président de l’UMP. Le tout pour aboutir à une déclaration de candidat à l’élection présidentielle de 2007.

AVERTISSEMENT

À L’ÉLYSÉE

Une intervention marquée par une absence : celle du mot « rupture ». Un oubli calculé, selon le président de l’UMP qui explique qu’aujourd’hui « tout le monde la revendique. Je n’ai plus besoin d’en parler. Je l’incarne ». Pour Nicolas Sarkozy cette « rupture » passe d’abord par une réponse à Jacques Chirac. Le chef de l’État a-t-il renvoyé son ministre dans les cordes en lui faisant comprendre qu’il ferait mieux de taire ses ambitions et de s’occuper de la sécurité des Français ? Qu’à cela ne tienne : Nicolas Sarkozy réplique que cette année préélectorale doit être l’occasion de « débats nombreux, approfondis et sans tabous ». Sous sa casquette de premier flic de France, il égrène son bilan : « - 1,30 % pour la délinquance générale, - 4,75 % pour la délinquance de voie publique. Soit, depuis 2002, une baisse de la délinquance générale de 8,2 %, contre une augmentation de 13,92 % entre 1998 et 2001. » Suit la baisse des d’infractions dans les transports ferroviaires, celle des violences aux personnes... L’avertissement au château est clair : « Arrêtez de m’agacer, j’ai des résultats. » Le message sarkozyste aux Français reste sur le registre traditionnel de l’insécurité : « Lutte résolue contre les bandes », « renforcement de la sécurité à l’école », « nouvelle réponse à la délinquance des mineurs » en modifiant l’ordonnance de 1945 dans un sens plus répressif... avec une innovation : la création d’une milice pompeusement baptisée « réserve citoyenne de la police nationale ». Et de jeter une nouvelle pierre dans le bilan de Jacques Chirac en affirmant sa volonté de mettre en oeuvre « une politique globale et cohérente de prévention de la délinquance » qui « n’a jamais été développée en tant que telle » ainsi que la « mise en oeuvre d’une immigration choisie et d’une intégration réussie » (voir article ci-dessous).

Des axes d’actions pour 2006 pour le ministre. Mais des voeux pour 2007 de la part du président-candidat de l’UMP. Janvier 2007, date à laquelle il espère quitter la place Beauvau car « le temps sera venu des grandes décisions à prendre pour dessiner l’avenir de notre pays (...) ». Au premier rang de ses propositions de candidat : « Changer les institutions de la République sans toucher au numéro. » Nicolas Sarkozy ne cache pas sa volonté de renforcer encore le caractère présidentiel du régime. Le futur chef de l’État « devra s’engager non seulement sur les grandes options, mais aussi sur tout ce qui concerne la vie quotidienne des Français (...). Il devra davantage engager sa responsabilité. Il devra prendre des engagements, expliquer comment et avec qui il les mettra en oeuvre ». Dans la vision sarkozyste, le premier ministre ne « dirige » pas l’action du gouvernement, mais « la coordonne ». À l’imitation des pays anglo-saxons, le gouvernement sera limité à « une quinzaine de ministres pleins portant des fonctions régaliennes ». Autres nouveautés institutionnelles que veut

introduire le président de l’UMP : le chef de l’État pourra venir « rendre des comptes à la représentation nationale », et le référendum sera supprimé. Voilà qui simplifie singulièrement son deuxième objectif : l’adoption d’une constitution européenne, « fondé sur la première partie du traité », par « le Parlement ».

Le président de l’UMP affirme que ses propositions « correspondent au besoin d’autorité qu’expriment les Français ». Il aime à se moquer des « droits-de-l’hommistes des beaux quartiers » qui s’inquiètent d’une « France ressemblant à je ne sais quelle dictature ». Mais force est de constater que, s’il refuse de changer le numéro de la République, c’est qu’il préfère vider le mot « république » de son sens.

Stéphane Sahuc

Publié dans France

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